Prélude de Pan  

 

 
Texte de Jean Giono    

 


Caroline Lagouge Chaussavoine     danse

Gaël Meve
l
   violoncelle, voix

Un récit brûlant d'actualité, qui nous interroge sur notre cruauté face aux animaux, sur la force de la nature et sur le respect nécessaire.

C'est la fête annuelle au village.
Les cafés sont pleins.
Un homme étrange entre dans le village et voit un bûcheron , au café du centre, maltraiter une colombe.
Il transforme la fête en un moment de folie où les hommes et les bêtes vont se mêler.


Extraits Vio    version courte 4mn

Extraits Vio    version longue 12mn

filmés à la maison en bois part Romuald Beugnon







 

photo Michel Di Maggio


photo Emmanuelle Lagouge

  

    Ce spectacle a été imaginé autour du texte de Jean Giono "Prélude de Pan"
(extrait du recueil de nouvelles “Solitude de la pitié” écrit par Jean Giono en 1932).

  La musique et la danse ont été créées pour ce spectacle, pour ce texte.
La pluridisciplinarité de ce projet lui permet de créer un univers tout à fait unique.
   Gaël Mevel dit le texte en même temps qu'il l'accompagne au violoncelle, créant ainsi une formidable osmose entre la musique et les mots, entre la musicalité du texte et la création musicale. Il puise dans son expérience des musiques improvisées et aussi dans son expérience de créateur pour le cinéma muet, sa capacité à trouver la matière musicale qui fera éclore le texte.
Il puise aussi dans son expérience du théâtre musical la possibilité de faire danser ensemble la musique et les mots.

  Caroline Lagouge Chaussavoine, chorégraphe, a imaginé ici une danse tout en retenue, en tableaux, mais aussi parfois fulgurante, et qui parle du lien étrange qui lie l’homme aux bêtes. Elle a créé un contrepoint fort et troublant, quelque part entre la danse, le masque, le bestiaire et la marionnette, et qui donne à entendre le texte et à voir une de ses parts cachées.

  Caroline Lagouge Chaussavoine et Gaël Mevel travaillent ensemble depuis 4 ans, sur différents projets écrits ou improvisés. Cette complicité est ici très importante.

  Le texte “Prélude de Pan” est unique dans l’oeuvre de Jean Giono, un texte extraordinaire qui puise dans la mythologie, la magie et l’écoute de la nature sa puissance et son originalité. Sa musicalité force, appelle la voix qui doit s’engager pour parler de la profondeur de ce qui nous lie à la nature et que nous avons oublié. Car il s’agit de ça : qu’avons nous oublié et qui nous fait défaut?
Quel rapport entretenons nous avec les animaux, et avec notre propre animalité ?
Où est la barrière qui nous sépare des animaux ?
La fête du village se transformera, par la venue d’un homme étrange, en moment de folie, un moment où, sans discernement, les hommes et les bêtes ne feront plus qu’un, cherchant malgré eux dans la fureur une voix pour annihiler les barrières.

 

 

 


 
 


 

 


extrait du texte

 

    L'homme avait la colombe sur son épaule. II se tourna vers elle et lui parla dans le langage des oiseaux. II soupira. La large main de Boniface était toujours tendue de son côté.
    - Allons...
    - Je la garde, dit l'homme.
    - Ca !... eut seulement le temps de dire Boniface tant il était comme écrasé par le sang-plan de 1'homme, ça alors !... et il se dressa en faisant craquer la chaise. II était dans notre salle à boire, debout comme un tronc de chêne.
    Et il resta comme ça, parce que 1'autre continuait, de sa petite voix tranquille. Cette voix, dés entendue, on ne pouvait plus bouger ni bras ni jambes. On se disait : « Mais, j'ai déjà entendu ça ? » et on avait la tête pleine d'arbres et d'oiseaux, et de pluie, et de vent, et du tressautement de la terre.
   - Je la garde, disait l'homme. Elle est à moi. De quel droit, toi, tu l'as prise, et tu l'as tordue ? De quel droit, toi, le fort, le solide, tu as écrasé la bête grise ? Dis-moi ! Ca a du sang, ça, comme toi ;  ça a le sang de la même couleur et ça a le droit au soleil et au vent, comme toi. Tu n'as pas plus de droit que la bête. On t'a donné la même chose à elle et à toi. T'en prends assez avec ton nez, t'en prends assez avec tes yeux. T'as du en écraser des choses pour être si gros que ça... au milieu de la vie. T'as pas compris que, jusqu’à présent, c'était miracle que tu aies pu tuer et meurtrir et puis vivre, toi, quand même, avec la bouche pleine de sang, avec ce ventre plein de sang ? T'as pas compris que c'était miracle que tu aies pu digérer tout ce sang et toute cette douleur que tu as bus ? Et alors, pourquoi ?
    On était tous comme des bûches mortes alignées au bord du chemin.
    - II est fou celui-la, dit Boniface.
    - Non, il n'est pas fou, redit 1'homme, c'est toi qui es fou. N'est-ce pas folie que de meurtrir ça,
vois !
    II prit délicatement la colombe sur son épaule. Il avait des gestes doux, avec elle. Elle était là, dans ses mains a roucouler tout gentiment. Et il déploya la pauvre aile morte, et il la faisait voir à tous, ballante, sans vie, comme une chose retranchée du monde. Et nous, nous avons fait alors : Oh ! Oh ! tous ensemble. Et ça n'était pas à la gloire de Boniface.
    - Encore une fois, qu'il fait le gros, tu me la rends, ma bête ?
    - Je t'ai dit : non. Je la garde. Tu t'en sers trop mal.
    - Alors on les regarda, parce que, Boniface, on le connaît. C'est pas un trop mauvais garçon, mais quand on le bute, quand on y va trop par le revers, ma foi, il n'est pas le dernier a sortir ses poings. Et on pensait : il est allé un peu fort, l’étranger.
    Antoine parut sur le seuil de la cuisine.
    La salle à boire n'est pas très grande ; d'un pas, Boniface pouvait être au fond. II fit ce pas, il dressa son bras qui était comme une branche maîtresse, son poing au bout comme une courge...
    Et il resta, comme ça, le bras en 1'air.


 

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